lundi 11 février 2013

RENDRE AU MALI SA SOUVERAINETÉ

36e congrès du PCF - Issa Ndiaye Mouvemement populaire du 22 mars - Vidéo Dailymotion



LETTRE D'ISSA NDIAYE AU PCF








Adresse au 36ème du Parti Communiste Français

Chers camarades de France
Chers invités du monde

Le Mali est en guerre, une guerre dont nous ne voulons pas mais qui nous a été imposée essentiellement par des forces étrangères à notre pays. Il s’agit d’une immense tragédie pour notre peuple. Nous savons qu’elle n’en est malheureusement qu’à ses débuts. Nul ne sait quand elle prendra fin.

Nous savons qu’il y a entre vous, amis du Mali de France, tout comme entre camarades maliens, de nombreux et difficiles débats à ce sujet. Les communistes français et surtout le peuple français ont été des amis de toujours du Mali. Combattre l’avancée des djihadistes vers le sud a provoqué chez vous beaucoup de débats, des interrogations. Mais sachez qu’il en est de même chez nous, au Mali. Nous avons les mêmes débats, les mêmes interrogations, les mêmes inquiétudes.

Dans un premier temps, nos populations étaient très en colère parce que tout se décidait en dehors d’elles, en dehors du Mali. Nous nous sommes sentis humiliés et révoltés par tant de mépris. Nous savions que toutes les décisions se prenaient à Paris, à Abidjan, à Ouagadougou et ailleurs, jamais à Bamako et cela continue toujours. Cela est inacceptable. Et nous avons apprécié les voix qui nous ont soutenus contre ces atteintes graves à notre souveraineté en tant que pays, en tant que peuple concerné au premier chef par ce qui nous arrive de par le complot tramé contre notre peuple avec la bénédiction de certains de ses fils et de ses dirigeants. Nous étions et restons confrontés à une dure réalité, à un piège mortel qui se renfermait sur nous. Nous sommes des militants qui détestons la guerre, surtout celle-là qui nous est imposée aujourd’hui et à un moment où nous avons été affaiblis et désarmés pendant deux décennies par un régime corrompu, présenté à tort comme une démocratie exemplaire alors qu’il n’en était rien. Cela faisait partie de la mise en scène orchestrée par les tuteurs occidentaux des démocraties africaines.
Face à l’avancée brutale des djihadistes, sans intervention extérieure, nous risquions d’être complètement anéantis. Nous n’avions plus le choix devant l’imminence du danger. L’intervention militaire française a été alors ressentie comme un soulagement par nos populations, même si nous étions contre par principe, même si elle ne règle pas les questions fondamentales et pose problème quant à ses fins ultimes.

Camarades de France et du Monde,
le 36ème Congrès du Parti Communiste Français intervient à un moment de crise généralisée du capitalisme mondialisée qui génère des tragédies un peu partout dans le monde.
En France, en Europe et ailleurs, elle a causé bien de drames qui font payer lourdement aux travailleurs les conséquences des politiques qu’ils n’ont jamais cautionnées. Un peu partout dans le monde et surtout en Afrique, les conséquences des politiques prédatrices du FMI et de la Banque Mondiale ont occasionné des guerres imposées aux populations traumatisées face aux incertitudes du lendemain. La crise au Sahel et la guerre actuelle dans le nord du Mali en est la triste illustration. Une lecture simpliste la dépeint comme un simple affrontement, un "choc entre civilisations" et une "lutte contre le terrorisme transnational islamiste" imposant à l’occasion une causalité unique, une vision dualiste du monde nourricière d’encore plus de violences.
Le drame actuel au Sahel et ses conséquences au Mali ne sauraient être appréhendés sans l’éclairage géopolitique et géostratégique des convoitises que suscitent les immenses ressources de son sous-sol auprès des multinationales occidentales notamment françaises en ce qui concerne le pétrole et l’uranium entre autres. Telle est la trame véritable de la guerre actuelle imposée au Mali par les "fous d’Allah" et les "fous du Saint Profit" au nom de la Charia, des trafics de drogue et d’otages, au nom du pétrole, de l’uranium et du Capital. 

Si l’intervention française au Mali a été momentanément saluée par la grande majorité des populations maliennes désarçonnées par l’avancée brutale des djihadistes vers le sud, l’arrêt tout aussi brutal de la reconquête du territoire national par l’armée malienne, aux portes mêmes de Kidal, suscite bien des interrogations sur les arrières pensées, les non-dits de cette intervention. Les chaudes déclarations d’amitié des autorités françaises à l’égard de certains touaregs, l’alliance de fait avec la rébellion ultra minoritaire du MLNA non représentative de l’écrasante majorité des communautés touaregs tout aussi opposées à la guerre et à la partition du pays, l’accompagnement militaire imposant par l’armée tchadienne des armées françaises, nous imposent davantage de circonspection quant aux affirmations de désintéressement de la France. Ce qui se trame aujourd’hui à Kidal finira certainement par déchirer les voiles de l’hypocrisie et du mensonge quant aux visées réelles des interventions étrangères au Mali, qu'elles soient françaises, européennes, africaines ou sous mandat de l’ONU.

L’intervention au Nord Mali ne vise pas seulement la sécurisation des approvisionnements énergétiques et autres des puissances occidentales, notamment de la France. Du même coup, elle remet en selle et réconforte un régime, des institutions, des hommes et des femmes, un système politique et une démocratie totalement corrompus et impopulaires et qui ont une responsabilité lourde dans le désastre dont aujourd’hui notre peuple est victime.
L’insistance avec laquelle le recours aux élections dans les délais les plus rapides est exigé par les occidentaux témoigne beaucoup plus de leur impatience à donner un vernis de légitimité à des élites prédatrices à leur solde. La question de la faillite même de l’Etat malien, la nécessité de son assainissement et de sa reconstruction sur des bases populaires et réellement démocratiques ne sont point inscrites dans la feuille de route de la Transition qui nous est dictée. La création d’une force d’interposition africaine puis sous mandat onusien finira par boucler la boucle de l’ordre ultra libéral d’accès total aux richesses du sous-sol malien que l’on veut imposer aux peuples du Mali, d’Afrique et d’ailleurs.
Comment ne pas comprendre alors que la guerre au Mali n’est que le prolongement de la compétition féroce entre deux impérialismes alliés par ailleurs aujourd’hui en Lybie et en Syrie, l’un classique et aux abois, occidental, et l’autre nouveau et conquérant, celui de l’impérialisme arabo-salafiste incarné par les pétro-monarchies du Golfe comme le Qatar et l’Arabie saoudite, fossoyeurs des libertés de leur propre peuple et bailleurs de fonds des économies occidentales en perdition.
Par ailleurs, on parle du Mali, on prétend venir à son secours, mais on refuse en même temps la parole à son peuple, le libre choix de ses populations pour décider en toute souveraineté de leur propre destin.

Camarades de France et du monde,
les relations de solidarité et de fraternité entre le Parti Communiste Français et les forces de gauche en France et au Mali ne datent pas d’aujourd’hui. Elles sont restées constantes et ne se mesurent point en nombre de barils de pétrole et de tonnes d’uranium extraits ou à extraire du sous-sol malien.
Je voudrais, à cette occasion, exprimer à l’endroit du Parti Communiste Français et du Front de Gauche toute la reconnaissance des forces patriotiques maliennes organisées au sein du Mouvement populaire du 22 Mars (MP 22) et de la Coordination des Organisations Patriotiques du Mali (COPAM) et, au-delà, pour leur soutien constant et multiforme, solidaire des mêmes visions et des mêmes espérances que nous nourrissons pour l’Humain en Europe comme en Afrique et partout dans le monde.
Nous avons les mêmes défis à relever, le même combat à mener en Europe, en Afrique, en Amérique latine, en Asie et partout ailleurs. Nous avons face au Capital le même destin. Nous devons tisser une solidarité de combats entre peuples du Nord et du Sud, entre femmes et hommes, entre jeunes et vieux, entre Humains.

Des coopérations et des solidarités concrètes sont à construire. Je pense aux coopérations entre villes à renforcer, entre jeunes, entre les établissements scolaires et universitaires, associations de femmes, intellectuels, clubs sportifs, artistes, couches sociales et professionnelles. Nous avons besoin aussi de solidarités politiques et nous vous remercions d’avoir entendu nos colères et nos volontés de souveraineté, perçu et partagé nos évolutions face aux dures réalités. Merci de continuer ensemble !

Je voudrais, en guise de conclusion, évoquer devant vous une complainte, celle de «Tinèni» ("la petite carpe" en langue bamanan), tirée d’un conte du terroir malien. Un jour, au cours d’une rencontre générale entre tous les êtres, chaque créature essaya d’écrire le drame de sa condition. Quand vint le tour de «Tinèni», elle évoqua, les larmes aux yeux, la tragédie qui était la sienne. Elle décrivit le monde comme une jungle où les plus forts dévoraient les plus faibles en toute impunité. Son destin à elle n’était pas seulement de finir en friture. Le plus cruel vient, dit-elle, quand une fois frite, on la prend par la queue pour la croquer par la tête à belles dents, en la fixant droit les yeux dans les yeux.
Il nous faut en finir au Mali, en Afrique et ailleurs avec le destin des «Tinèni». En France, au Mali, en Palestine, au Kurdistan, en Amérique latine, en Asie, en Europe et partout dans le monde, les peuples doivent se donner la main pour construire ensemble des alternatives populaires aux camisoles de force imposées ici et là par les puissances d’argent.
Le chemin de la paix et de la solidarité est long et difficile. Pour y parvenir, il nous faut réinventer l’avenir.
Alors pour cela osons ensemble "rallumer les étoiles".
Plein succès au 36ème Congrès du Parti Communiste Français.
Je vous remercie
Paris le 09 Février 2013
Pr Issa N’DIAYE


issandiaye_flash@yahoo.fr





Arrêter l’engrenage
d’une logique guerrière







À nouveau, un pays d’Afrique est entraîné dans une logique de guerre
Le Front de gauche partage l’inquiétude des Maliens face à l’offensive des groupes djihadistes, et comprend qu’ils se sentent soulagés par toute action pouvant empêcher leur progression. Depuis plusieurs mois, les exactions et exécutions sommaires pratiquées par ces groupes dans les zones qu’ils contrôlent au nord du pays illustrent le danger qu’ils représentent pour les libertés et la dignité du peuple malien et sa souveraineté.
Le président de la République a décidé d’engager l’armée française.

Risque de déstabilisation
Mais cette intervention montre désormais le risque d’un engrenage dans une guerre sans fin prévisible, et sans véritable solution durable pour le peuple malien et la reconstruction du pays. Le risque est grand d'une déstabilisation de toute la région, comme on l'a vu en Algérie avec la prise d’otages et son dénouement tragiques.

Défaut démocratique
Elle a été décidée unilatéralement, sans respect des règles fixées par l’ONU qui établissait qu’elle devait obtenir par avance l’approbation du Conseil de Sécurité de l’ONU, et être menée par des troupes de l’Union Africaine, dans les limites imposée par l’exigence de la souveraineté malienne.
Elle a été décidée par la Présidence française sans consultation du Parlement, et ses objectifs stratégiques n’ont pas été définis, contrairement aux engagements pris par le candidat François Hollande.
Elle ne se limite pas à des frappes aériennes, mais engage au sol des milliers de soldats de l’armée française, qui visent désormais à reconquérir et à occuper le Nord du Mali, outrepassant tout mandat.

Coût
Elle est engagée alors que le gouvernement assume une politique d’austérité, qui réduit les dépenses dans tous les secteurs, mais n’hésite pas devant les coûts extraordinaires d’une guerre qui va s’installer dans la durée. Un argent qui serait plus utile dans l’aide à la coopération en Afrique, alors que celle-ci est sans cesse en diminution.

Pour quels intérêts
Elle se déroule dans une région riche en pétrole, en minerais stratégiques, en uranium, que les grandes puissances cherchent à obtenir à bas coûts, privant les pays de leur souveraineté sur leurs ressources naturelles.
C’est notamment le cas de la France qui, dans la région du Sahel, vise à contrôler l’extraction de l’uranium avec AREVA.
Elle se tient dans une ancienne colonie française, et suscitera une réaction contre elle car rappelant les pratiques dominatrices de la Françafrique qui ont amenées à affaiblir les états et la démocratie dans le région. Et elle redonne un soutien aux régimes des pays voisins pourtant rejetés par leurs peuples et leurs oppositions démocratiques.
François Hollande, lors de sa première visite en Afrique en novembre dernier, répétait : «En aucun cas, la France n’interviendra elle même au Mali».

Le Front de Gauche exige une clarification des objectifs stratégiques, avec un débat public transparent et
un vote au Parlementmaintenant et non «dans quatre mois» comme l’a annoncé François Hollande.

Le Front de Gauche demande que soit mis fin à l’envoi de troupes françaises au sol visant la reconquête du Nord du Mali.
Toute interposition africaine doit être placée sous mandat de l'ONU. La question de l’intégrité du territoire malien doit être du ressort des forces maliennes. Sa reconquête ne doit pas pour autant entraîner des exactions en retour contre les populations du nord du pays, Arabes ou Touaregs, abusivement amalgamées aux «terroristes».

Les solutions politiques doivent primer sur les logiques guerrières. La restauration de la souveraineté territoriale du pays doit aller de pair avec la reconstruction d’un Etat, d’une démocratie, d’une souveraineté sur les ressources naturelles, une renégociation des droits du peuple Touareg, un processus national constituant impliquant le peuple malien lui-même.

Le Front de Gauche défend et appelle à une autre politique de la France avec l’Afrique, rompant avec les politiques de domination et d’interventions militaires répétées qui n’ont abouti qu’à alourdir sur le dos des peuples africains le fardeau de la mondialisation libérale et des politiques d’ajustement structurels imposées par le FMI et les grandes puissances.

Le Front de Gauche apporte son soutien au peuple malien, et appelle à la solidarité des peuples face aux épreuves qu’il traverse.

Le 29 janvier 2013
Collectif Afrique du Front de Gauche

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire